Je me suis prêtée à l’exercice d’écrire une Nouvelle pour d’illustrer les aspects Vénus/Pluton en natal.
Je vous souhaite une agréable immersion dans le monde Plutonien.
« La femme écho.
8h37. Hôtel Jupiter Lisboa. Il me demande de partir. De le laisser seul. Je ressens son inquiétude. Depuis que nous nous sommes assis sur ce canapé à l’entrée du hall, je le sens absent. Ses yeux sont fuyants. Son mental fonctionne à plein régime. Il est anesthésié avant l’heure. Ses mains se détachent des miennes. Son geste enclenche une décharge de douleur dans le bas de mon ventre. J’essaye de la nier mais elle devient de plus en plus présente. Je tente de garder le contact mais je vois bien que je l’ai perdu. Il est parti. De nous. De lui. Comme absent de lui-même. Son corps l’a trahi. Soudainement, je me sens comme une étrangère. Je m’interroge sur la raison de ma présence ici, à Lisbonne. Loin de tout. Si loin et si proche de lui. De nous. Cette pensée me fait mal. Au cœur. Au corps. Je voudrais qu’il l’éclipse avec la chaleur d’un geste tendre mais rien ne se passe. Je prends les devants et je l’embrasse en souriant. Je lui dis quelques mots réconfortants. Mon mental est déjà ailleurs, je suis partie dans la salle de restaurant.
Je me retrouve seule, face à moi-même, entourée de couples et de familles en vacances qui ne pensent qu’à se servir un maximum de fois au buffet. Je pense à lui. A elle. Au message qu’il lui a envoyé un peu avant qu’il ne me demande de partir. Elle est là. Avec nous. Elle est là quelque part dans sa tête. Un espace lui est réservé. 7 jours/7, 24h/24. J’ai envie de crier. De renverser la table et de casser la vaisselle. La serveuse vient me demander si je désire une boisson chaude. Je prends un moment avant de lui répondre. Je ne suis pas prête à ce rappel brutal à la réalité. Ma tête me fait mal. Mon corps hurle. Je me sens comme prisonnière de l’écho de cette femme. Tout comme lui. Je le sens. Je sens son ombre derrière chacun de ses sourires, derrière chacune de ses décisions, derrière chacune de ses pensées. La puissance silencieuse de cette femme réveille de vieilles peurs enfantines. Elle me renvoie à ma vulnérabilité. Elle me renvoie à la fragilité du lien qui nous unit lui et moi. Elle sabote les jeunes fondations de notre amour naissant. Je perçois sa douleur dans tous les moments de bonheur que je vis avec lui. J’entends la violence de ses mots à travers la douceur de nos échanges. Je vois la peur dans chacun de ses actes et l’amour dans chacun des nôtres. J’admire la finesse de son jeu. J’admire l’énergie qu’elle déploie à vouloir coûte que coûte se placer entre nous. Sans pudeur. Sans aucun amour propre. Fougueuse comme le serait une jeune amante aux prises de son premier amour. Elle nous offre depuis l’annonce mondaine de notre couple un étonnant spectacle privé bien loin de l’image statutaire qu’elle montre au monde. Un spectacle auquel j’assiste impuissante. Un spectacle dans lequel je me retrouve à jouer un rôle malgré moi. Un rôle qui change au gré de ses humeurs et qui vient mettre en lumière toutes les douleurs que je porte encore en moi. Je me retrouve happée par la puissance du triangle. Moi, elle, lui. Elle, lui, moi. Lui, moi, elle. On dirait les paroles d’une comptine pour enfant. Si seulement…
Cette soudaine prise de conscience m’attriste profondément. Violemment. Je sens les larmes remplacer les cris et les interrogations se bousculent dans mon esprit. Comment en étais-je arrivée là ? Par quelle porte ? Avais-je suivi le mauvais lapin blanc ? Alice, toi qui connais le chemin, aide-moi! Guide-moi ! Explique-moi comment pouvoir sortir de ce triangle sans me perdre ? Et sans le perdre lui. Crois-tu que cela est possible ? Ne l’ai-je pas déjà perdu ? Ce lien que j’ai ressenti si fortement entre nous n’était-il qu’une projection ? Ses blessures que je vois clairement aujourd’hui vont-elles trouver leur place entre nous ? Je me sentais submergée par une vague de panique. Et si ça ne l’était pas… si la douleur qui les unissait était plus forte que tout. Si le lien qu’ils avaient construit au fil des années était plus solide que Nous. Et s’il la choisissait elle malgré lui. Et s’il l’avait toujours choisie.
Je compris à cet instant que je n’avais aucune certitude. Que je ne pouvais plus nier mon besoin de contrôle et de sécurité. Que mes craintes et mes interrogations bien que légitimes entretenaient ma place dans le triangle. Que pour sortir de mes peurs et gagner en autonomie relationnelle, j’allais devoir revoir ma manière de fonctionner. Je posais ma tasse à café. Pris ma veste. Et retournais dans la chambre avec une furieuse envie de me blottir dans la chaleur des draps propres en attendant de le retrouver. »